Faiblesse — Ft. Dick.

Le lasso avait claqué, pour fendre l'air en un hurlement. Le son avait été suffisamment fort pour prévenir de sa présence, alors que Donna pénétrait le petit local, certaine d'être seule. Elle avait fini par obtenir des informations supplémentaires sur le lieu de rendez-vous du ravisseur, décidant de ne pas attendre Dick, pour les prendre sur le fait. L'amazone était donc arrivée en avance, afin de se dissimuler à sa guise, pour ensuite les surprendre. Si ce plan apparaissait prometteur, à première vue, il allait en être autrement, une fois qu'elle aurait entendu de quoi il en retournait.
À peine dix minutes après avoir trouvé la planque adéquate, les deux hommes se retrouvaient dans ce fameux local. Le premier avait ainsi apporté une boite, qu'il s'était empressé de déballer, sous les yeux du second. Son contenu n'avait pas l'air très propre, mais en aucun cas, Donna ne s'était attendu à ça. Une relique ? Apparemment, il venait de tomber sur quelque chose de très recherché, et surtout, de très puissant dans son univers. Lorsqu'il se mit à parler de demi-dieu, et de titans, Donna avait aussitôt pensé à ses amis, et à Diana. Mais le sujet n'avait rien d'aussi familier, en profondeur. « Le fils d'Hermès va être content, on va devoir lui apporter très rapidement, avant que l'un de ses foutus héros ne l'intercepte. J'ai déjà échoué une fois, ça n'arrivera pas deux fois. ». Était-il en train de parler d'elle, et de Dick ? Cela signifiait qu'ils les avaient remarqués, depuis le début ? Déstabilisée, Donna n'avait pas osé intervenir, souhaitant d'abord en apprendre plus. Mais alors qu'elle se déplaçait subtilement, pour mieux entendre, le second avait fini par sortir la relique de sa boite, révélant une épée très ancienne. Ce morceau de relique ne lui était pas inconnu, bien au contraire, elle se souvenait avoir déjà vu cet emblème quelque part. Après s'être promis d'en parler à Diana, elle avait fini par quitter sa cachette, pour faire face à ses deux ennemis. Pour elle, il était hors de question de les laisser filer avec cette arme. Alors que le premier rangeait rapidement l'épée dans son réceptacle, le second s'engageait en direction de l'amazone, pour l'affronter. Le premier coup de lasso avait, forcement, pu être esquivé, mais pas le second, qui l'avait projeté à quelques mètres d'elle. Mais alors qu'elle s'apprêtait à le mettre KO, le premier l'avait attaqué par surprise, lui révélant ainsi ses capacités extraordinaires. Il n'était pas humain, et semblait avoir des pouvoirs familiers aux siens. Le combat avait duré un long moment entre les deux ennemis, mettant la confiance de Donna à rude épreuve. Elle était déjà morte une fois, mais n'avait pas vu son sort venir. Alors que cette fois, elle avait l'impression de prendre des risques conséquents et prévisibles. Elle aurait pu avoir l'avantage de l'endurance sur le temps, si ce dernier n'avait pas pris la décision de sortir l'épée. Celle-ci s'était mise à brillé, sous sa poigne, encore plus impressionnante et menaçante que son lasso. Donna avait tenu quelques instants, mais un coup de la lame avait suffi à fendre en deux son lasso, pourtant indestructible. Choqué, et déstabilisé, elle n'avait pas pris garde au second coup, qui l'a blessa au flanc. La peur n'était pas un sentiment habituel et familier chez l'amazone, et pourtant, c'est bien ce qui venait de la pourfendre. Donna avait ainsi pris la fuite.
Une fois rentrée, elle avait été soulagée de ne pas y retrouver Dick, se précipitant dans la salle de bain pour arracher ses affaires, et ainsi tenter de soigner sa blessure profonde. Elle avait abandonné son lasso au recoin du lavabo, le cœur serrée. Comment cela était-il possible ? Donna ne s'était jamais sentie aussi faible. Elle n'avait pas entendu Dick rentré, essayant, malgré ses tremblements, et le sang qui trempait ses mains, d'enfiler le fil dans l'aiguille, qui était destinée à la recoudre.

La blessure était assez profonde, et pourtant, Donna n'était pas tombé dans les vapes. Elle avait l'intention de se soigner elle-même, sachant qu'elle disposait d'aptitude lui permettant de guérir beaucoup plus rapidement qu'un humain. L'amazone n'arrivait pas à penser à autre chose qu'à son lasso, brisé en deux. Attendant sagement sur le rebord du lavabo, qu'elle trouve une solution pour le réparer. Étais-ce d'ailleurs possible ? Après tout, si les amazones avaient été capables de la ramener à la vie, pourquoi ne pourraient-elles pas ressouder son lasso magique ? À force d'appuyer sur sa blessure, ses mains étaient rouges, et tremblaient, pour autant, elle ne freinait pas ses ardeurs, attrapant une aiguille désinfectée, puis du fil à recoudre. Elle avait déjà fait ça, elle pouvait très bien le refaire aujourd'hui, n'est-ce pas ? Sur le point de faire une première tentative, pour enfiler le fil dans la fenêtre de l'aiguille, elle fut interrompue par l'arrivée surprise de Dick, qui venait de pénétrer la salle de bain. Merde. Il allait, et sans aucun doute, lui reprocher d'être partie en mission sans lui. Donna n'osait pas le regarder, le laissant découvrir la scène avec stupeur. « Soit tu m'aides, soit tu me laisses, mais ne t'avises pas de me faire des reproches. C'est pas le moment. » Lâchait-elle, en un souffle. Elle tremblait beaucoup trop pour arriver à ses fins, et espérait donc que le Grayson soit compréhensif avec elle. Au fond, ce n'était pas sa blessure qui l'inquiétait le plus, car elle avait déjà subi de nombreuses blessures par le passé, et si elle avait été capable de rentrer dans cet état, c'est que celle-ci n'était pas mortelle. Ce qui l'a tracassait le plus, c'était de savoir qu'une arme était suffisamment puissante pour fendre en deux son si solide lasso. Et surtout, que celle-ci était entre les mains d'ennemis avisés et préparés. Assise sur le rebord de la baignoire, elle n'essayait plus de retenir le flux de liquide rouge, qui quittait son corps, dépassé par les événements. Donna n'avait que trop rarement connu cette maudite sensation qu'était la peur, et encore en cet instant, elle avait l'impression qu'elle n'arriverait pas à s'en débarrasser aussi facilement. « Je vais bien, ok, je veux juste... et j'y arrive pas !! ». Elle s'agaçait un peu, manquant de lâcher l'aiguille. Son sang avait déjà sali le sol sous ses pieds, et le rebord du lavabo. Elle avait en plus étalé ça avec ses mains, chaque fois qu'elle avait attrapé quelque chose, ou s'était servie dans un placard. Donna était en soutien-gorge, sévèrement blessé, et bouleversé, et pourtant, elle ne pensait qu'à une chose : son lasso. « Il est brisé, je comprends pas... je croyais que c'était impossible. ». Reprenait l'amazone, en laissant comprendre par un simple regard en direction de son lasso, de quoi elle parlait. Donna n'avait fait aucun jeu de mots, pas de réplique douteuse, rien. Elle n'en était même pas capable en cet instant.

Donna savait ce qui l'attendrait ensuite. Dick allait lui faire des reproches, la morale, et tout le tralala. Bien sûr qu'elle était consciente des risques qu'elle venait de prendre, en se rendant seule dans cet entrepôt. Évidemment qu'elle mesurait l'ampleur de la situation, et surtout, à quel point cela aurait pu être bien plus grave pour elle. Mourir une seconde fois ne faisait pas partie de ses projets, cependant elle n'avait pas pu résister à l'appel du danger, pensant pouvoir avancer dans une affaire qui stagnait depuis beaucoup trop longtemps à ses yeux. Et si elle avait attendu Dick ? Peut-être aurait-elle manqué le rendez-vous ? Au final, cela n'avait plus tellement d'importance pour elle, complètement obnubilé par son lasso brisé.
Lorsque le Grayson prit la décision de lui venir en aide, elle fut soulagée. Non seulement, elle avait été incapable de glisser le fil dans l'aiguille, mais qui plus est, elle ne cessait de trembler, affaiblit par sa blessure encore ouverte et profonde. Même si ses capacités d'amazone lui permettaient de se remettre plus rapidement qu'un humain, d'une blessure, il fallait malgré tout prodigué des soins en amont. Afin de ne pas laisser son coéquipier dans l'incompréhension, la Wondergirl avait fait part de ses inquiétudes, quant à l'état de son arme principale. Même si cela n'avait pas été très évident au départ, Dick avait vite compris, après avoir jeté un œil au lasso brisé. La surprise se lisait dans son regard, et avait une énième fois brisé le cœur de l'amazone, qui était beaucoup trop attaché à son instrument d'attaque. C'était comme si.. il était vivant ? Pour autant, Dick avait fait preuve d'un sang-froid sans égal, prononçant aussitôt le nom de sa sœur, pour la rassurer. Il est vrai que Diana avait vécut beaucoup plus de choses qu'eux, alors... peut-être avait-elle l'expérience suffisante pour l'aider à le réparer ? « Oui, il le faut. ». Se contentait de répondre la wondergirl, en posant, enfin, ses iris sur le visage de son petit-ami. Il apparaissait beaucoup plus assuré qu'elle, précipitant sans difficulté le fil dans sa cible, avant de rincer un peu sa plaie. Donna avait contaminé de son sang toute la salle de bain, et abandonné son t-shirt trempé de rouge, sur le sol. Prête, elle avait fermée les yeux au premier coup d'aiguille, se retenant de gémir de douleur, chaque fois que le fil resserrait la blessure. Sa respiration se saccadait à chaque piqûre, mais elle faisait preuve de courage, ne souhaitant pas abîmer sa réputation auprès du Nightwing. « On verra plus tard. ». Rétorquait-elle, entre deux crispations. Il avait été sacrément efficace et rapide. Après y avoir jeté un œil, Donna était restée immobile pendant quelques instants, gérant la douleur comme elle le pouvait.
Pendant ce temps, Dick se lavait les mains... plus longtemps que nécessaire. Cela avait fini par intriguer l'amazone, qui, après s'être relevé, avec difficulté, avait posé sa main sur ses poignets pour le sortir de sa léthargie. Elle avait éteint le robinet d'un geste, posant ses prunelles sur le visage du jeune homme. « Ça va ? » C'était un peu ironique, puisque des deux, c'était elle la blessé. Mais ce type de comportement ne lui ressemblait pas. « Ne me dis pas que la vue du sang te donne envie de t'évanouir ?! ». Elle se servait de l'humour pour le faire parler, mais c'était généralement très efficace. Sa main était restée sur son premier poignet, se retenant un peu à lui, par la même occasion, pour rester debout. « Désolé, si j'ai été un peu... C'est juste que... mais j'ai réussi à me traîner jusqu'ici, donc, ça va. ». Elle avait fini par laver ses mains, elle aussi, épongeant comme elle pouvait, son sang, autour du lavabo. « Je crois que j'ai des compresses dans le placard-là.. » La Troy n'était pas très à l'aise, d'abord parce qu'elle ne savait pas comment aborder le sujet, aussi parce qu'elle n'avait jamais fait face à ce Dick là. Alors, elle le faisait travailler, pour gagner du temps. « J'ai voulu... y aller sans toi, en pensant bien faire. Ils avaient une arme beaucoup plus puissante que la mienne. Je regrette... ». Donna manquait d'entraînement pour faire des excuses. Mais au moins, elle avait fait l'effort d'essayer. Elle craignait dorénavant sa réaction, crachant petit à petit le morceau. Son regard se reposa, tristement, sur son lasso, esquivant celui de Dick, qui n'allait pas être très ravi.

La réaction du Nightwing venait d'ébranler davantage l'amazone, qui ne s'était absolument pas attendue à ce type d'attitude de sa part. Il venait de se refermer, comme une huître, se contentant de répondre d'un geste de la tête, aux inquiétudes de la brunette. Était-il en colère ? Ou bien essayait-il de la préserver de ses propres émotions ? Ils se connaissaient par cœur, allant toujours au bout des choses, et ne se dissimulaient jamais rien. Mais cette fois, Donna ne reconnaissait pas Dick, pire encore, elle ne parvenait pas à le décrypter. Dans d'autres circonstances, elle se serait permis de le confronter, mais la Troy réalisait bien qu'elle n'aurait pas la force ni l'énergie suffisante, pour le provoquer. Il avait lourdement posé ses prunelles dans les siennes, lorsqu'elle prit la décision de lui raconter les événements. Donna avait pu lire la déception dans son regard, mais elle n'était pas sur, puisqu'il apparaissait particulièrement reclus sur lui-même. Un mur de brique s'était élevé entre eux, et avait mis l'amazone encore plus mal à l'aise qu'au départ. Le Grayson s'était exécuté, récupérant les compresses neuves, avant d'ouvrir enfin la bouche. Crispé comme jamais, il ne dégageait pourtant aucune rancœur ou animosité, quant à la décision irresponsable de la jeune femme. Donna n'osait plus déglutir, se contentant d'encaisser en silence, son manque de sermon. Où était le vrai Dick Grayson ? Pendant ce temps, il s'occupait de protéger sa blessure suturée, l'assommant de question purement technique. « Ils... non. ». Abrégeait donné, un peu sonné. « Le démon était là, avec un autre type. Ils ont échangé une boite, et il y avait une épée d'une puissance... inimaginable. Je pense que c'est une arme mystique, sinon, ils n'auraient jamais pu...». Briser son lasso ? Elle n'osait même plus le dire, reposant ses iris sur son arme inanimée. « Ils ne sont définitivement pas de chez nous, en tout cas. » Concluait la Wonder Girl, alors que Dick achevait ses soins. Il avait pris soin de scotcher la compresse, beaucoup trop professionnel à son goût. Est-ce qu'il venait d'endormir son humanité ? Ou se retenait-il toujours de la sermonner ? Le cœur recroquevillé dans sa poitrine, Donna ne savait plus quoi faire, ni comment se comporter. Pendant un instant, elle avait hésité à ramasser son chemisier plein de sang, abandonné au sol, mais elle avait vite compris qu'elle n'en aurait pas été capable, du fait de sa blessure encore fraîche. « C'est tout donc ? ». Finit-elle par lâcher, alors qu'elle osait enfin le regarder. « Pas de cri, de moral, de sermon, de sarcasme blessant ? Ou bien, tu vas attendre que ma blessure ait cicatrisé un peu ? Non, je suis sûr que ce n'est pas pour ça que tu fais l'étranger avec moi, là, tout de suite. » Étonné d'avoir pu se libérer d'autant de poids, elle avait senti sa tête tournée, s'asseyant brusquement de nouveau, sur le rebord de la baignoire. La douleur l'avait lacéré avec violence, suite à son manque de précaution, mais elle s'était retenue de hurler, lâchant un gémissement presque inaudible.

Un étourdissement de plus, et Donna avait cédé, retenant de justesse un gémissement, alors qu'elle se laissait asseoir sur le rebord de la baignoire. Elle ne savait plus comment comprendre la réaction du Grayson, alors qu'il s'était emmuré en silence, et qu'il évitait de s'exprimer de manière beaucoup plus virulente, sur la prise de risque puérile de l'amazone. Après avoir répondu à ses questions comme elle pouvait, Donna avait fini par perdre patience, lui réclamant presque un sermon. Malheureusement, cela n'avait pas été très efficace, puisque Dick s'était contenté de ranger la salle de bain. Elle avait bien compris qu'il évitait de croiser son regard, et surtout, de montrer ce qu'il ressentait. Sur le coup, cela ne l'avait pas aidé, l'enfonçant davantage dans ses remords et regrets. Son refus, d'obtempérer avait fait claquer l'armoire à pharmacie, faisant presque sursauter l'amazone, qui venait de poser ses doigts sur la compresse de sa blessure. Clairement, oui, il était contrarié, mais d'habitude, il ne se retenait pas, même si ses propos restaient indolores pour Donna. Aujourd'hui, son silence coûtait plus cher que ses cris. Son ton froid et distant n'engageait rien de bon, même si derrière, il essayait de lui montrer qu'il pouvait être prévenant, mais ce fut encore plus pénible, lorsqu'il s'exprima sur la difficulté de la voir dans cet état. Donna s'était figée, l'observant en train de jeter son top dans la poubelle. Dans d'autres circonstances, peut-être qu'elle aurait bougonné, mais pas cette fois. Ironiquement, c'est lui qui l'inquiétait maintenant. Dick allait jusqu'à lui donner des ordres, esquivant toujours son regard, avant de prendre officiellement la fuite. Donna était partagée, entre, l'envie de lui hurler dessus, alors qu'elle n'en aurait pas la force, et celle de s'excuser un million de fois, pour lui avoir causer cette peine supplémentaire. Elle n'avait pas du tout fait le rapprochement avec sa précédente disparition, encore obsédé par l'état de son lasso, qui gisait le long du lavabo. En se redressant, elle l'avait récupéré, quittant avec pénibilité la salle de bain. Évidemment, elle devait traverser le salon, qui donnait sur la cuisine ouverte pour rejoindre sa chambre, alors elle en avait profité pour jeter un œil à ce qu'il faisait par là. Dick n'était pas dans son état normal, et Donna commençait à se poser des questions. Pour autant, elle n'avait pas prévu de le harceler sur le sujet, sachant pertinemment que ce n'était pas le bon moment...
Elle était sur le point de rejoindre sa chambre, lorsqu'elle fut surprise par un bruit sourd provenant du salon derrière elle. En se retournant, elle reconnut aussitôt l'un des démons/sorciers, qui n'avait pas hésité une seule seconde, avant de briser la vitre, pour pénétrer l'appartement. Il était armé, mais pas de cette maudite épée. Par reflex, elle avait envisagé de faire claquer son lasso, mais celui-ci n'allait pas répondre, alors elle était resté figé par la détresse, au moins quelques secondes. « C'est lui ! ». Avait-elle lâché, à destination du Grayson. Alors il l'avait suivie jusqu'ici ? Son second allié n'avait pas l'air d'être là, arrangeant les affaires des deux amis. L'amazone n'avait pas l'intention d'abandonner Dick à cette confrontation, alors elle s'était avancée pour faire face à l'ennemi. Pendant une petite seconde, elle était parvenue à oublier la douleur au ventre, mais cela n'avait pas durée. « Oh, quelle tristesse, on a cassé ton joujou ! ». Sa langue claquait, alors qu'il narguait Donna. Il n'en fallut pas plus à la jeune femme pour prendre son élan, s'apprêtant à lui foncer dessus...

La petite provocation verbale du démon avait suffi à ébranler la solidité mentale de l'amazone, qui brusquement ne contrôlait plus rien. Elle avait déjà pris son élan, puis avait foncé sur l'intrus, sans se préoccuper de sa blessure, encore fraîche. Donna vivait déjà très mal la destruction de son lasso, mais si le coupable apparaissait de nulle part, pour achever la confrontation, clairement, elle n'allait pas pouvoir se retenir. Son sang avait vite atteint ses tempes, bouillonnant à l'intérieur de son crâne, pour alimenter chacun de ses muscles. Malgré les ordres de son cerveau, pour attaquer, l'amazone n'avait pas pu gagner en vitesse, d'abord parce qu'elle n'était pas au top de sa forme, ensuite parce qu'elle avait été brusquement rattrapée par Dick, en plein élan. Concrètement, si Donna avait été au mieux de ses capacités, même le Grayson n'aurait pas pu l'arrêter. Sur le coup, elle n'avait pas compris tout de suite, sonnée par ses efforts, alors que Dick l'entraînait de force jusqu'à la chambre. Elle venait d'atteindre le lit, lorsqu'elle comprit qu'il venait de la priver d'une véritable revanche, et qu'il prévoyait de gérer la crise sans elle. Pas en état de se battre ? Alors quoi, elle va le laisser se faire tuer sans intervenir ? Donna avait déjà bien compris que ce démon ne manquait pas d'expérience, ajoutons à cela le fait qu'il vienne d'un monde complètement différent... Dick allait donc faire face à l'inconnu, comme elle, il y a quelques heures. Elle avait fait un geste brusque, afin de se redresser pour le retenir, mais sa blessure l'avait freiné, et le Grayson s'était précipité dans le salon, dissimulant ainsi la future scène de combat à la jeune femme, en fermant la porte. « Je vais le tuer. ». Et là, elle ne parlait pas du démon. L'amazone appréhendait beaucoup plus de retrouver le corps inconscient de son compagnon, que de subir les conséquences de ses actes. Mais Donna ne se raisonnait déjà plus depuis longtemps, et cette journée ne faisait que faire exploser la bombe, qu'elle tentait pourtant, de contenir depuis son retour.
Après cinq bonnes minutes, elle était parvenue à arracher ses fesses du lit, affrontant la douleur, avant d'en faire abstraction. Dorénavant, elle n'avançait qu'avec sa tête, et non plus avec son corps. Elle ne savait pas encore où elle avait bien pu trouver cette force, mais quelque part, cela n'aurait pas dû l'étonner. Elle était une amazone, élevée par Diana Prince, et surtout, elle venait de revenir d'entre les morts. Donna avait pris la peine de protéger sa blessure, avant d'enfiler un t-shirt. Elle avait recyclé sa vieille et courte épée, et avait protégé ses bras avec des bracelets modelés en métaux. L'amazone n'avait pas utilisé ses objets depuis longtemps, lui rappelant à quel point son lasso magique lui manquait. Jugeant avoir suffisamment perdu de temps, elle avait fini par quitter la chambre, pour rejoindre les deux hommes. Dick n'était pas inconscient ou gravement blessé, ce qui en soi venait de considérablement soulager la brunette. En croisant son regard, elle avait compris que cela ne lui plaisait pas, mais pour le moment, l'urgence était ailleurs. « Bah ? Tu n'es pas encore morte ? ». Apparemment, la blessure engendrée par l'épée mystique aurait dû la tuer, donc ? Agacé, et surtout gêné de discuter des événements devant Dick, elle avait pris la décision de se joindre à eux directement, sans demander l'avis à son binôme. Ce dernier maîtrisait particulièrement bien la situation, mais pour combien de temps ? Et si le second démon apparaissait, lui aussi ? L'amazone avait tenté une prise par-derrière, à l'aide de son épée, mais ce dernier, rapide, avait esquivé. Donna aurait voulu être capable d'utiliser ses pouvoirs, mais elle était encore trop faible. Alors, elle s'était montrée maline, en faisait diversion, pour offrir la possibilité au Grayson de prendre l'avantage...

Donna utilisait toutes ses ressources mentales et physiques, pour tenir debout, et surtout, pour apparaître invincible. La douleur était bien là, quelque part, mais elle était parvenue à y faire abstraction, au moins le temps de maîtriser cette intrusion. L'indésirable était fort, elle n'en doutait pas, mais elle savait qu'il l'était bien moins face à deux Titans, presque préparé cette fois. Il avait commis l'erreur de venir sans l'épée, ce qui en soi, était un avantage pour les deux alliés. Même s'ils ne s'étaient pas attendu à sa visite surprise, Donna avait eu le temps de recueillir des informations à son sujet, suffisamment pour savoir qu'ils avaient affaire à un démon provenant d'un autre univers. L'épée n'était définitivement pas de leur monde, non plus. Sans cette arme, il est clair que l'amazone n'aurait eu aucune difficulté à les maîtriser, lors de leurs précédentes rencontres, mais elle s'était bêtement fait surprendre par les pouvoirs de celle-ci.
Donna avait paré le premier coup, offrant une distraction suffisante à Dick, pour lui permettre d'attaquer plus aisément. L'électricité provenant de ses bâtons l'avait déséquilibré, mais l'individu avait été malin, se raccrochant de justesse, à Donna. Sur le coup, elle se mit à hurler, alors que la douleur de sa blessure venait de la rappeler à l'ordre. Mais l'amazone se devait de ne pas céder une seconde fois, reprenant son souffle, avant de le bloquer. La fureur grimpait en flèche dans ses vaines, et c'est ainsi qu'elle comprit que c'était le bon moment. La Troy avait délibérement abandonné sa courte épée, pour plaquer ses deux avant-bras métallisés des deux côtés de sa nuque. Grâce aux bracelets forgés par les amazones, elle l'avait serré si fort, qu'il avait rougi d'asphyxie. Son arme avait rejoint la sienne, sur le sol, alors qu'il n'arrivait plus à respirer, et ainsi, elle avait offert une nouvelle occasion au Grayson de le mettre KO. Elle savait qu'au moment où elle reprendrait son souffle, qu'elle oserait inspirer de nouveau, la jeune femme serait de nouveau affaiblit par sa plaie cousue, et elle devrait lâcher sa prise. À force de lui écraser le cou, elle l'avait même soulevé du sol, intensifiant la détresse de l'ennemi, qui ne tarderait pas à sombrer. Si Dick n'intervenait pas dans la minute, il est clair que l'amazone allait le tuer. La brunette ne se contrôlait plus, et surtout, ne réalisait pas vraiment ce qu'elle était en train de faire ; complètement submergé par l'adrénaline, et la gestion de ses capacités... qu'elle redécouvrait.

Donna ne bougeait plus, ne respirait plus, accaparée par sa prise, qu'elle avait beaucoup trop aisément soulevé du sol. Ce dernier avait fini par perdre son arme, à cours d'oxygène. La puissance de la Wonder Girl associée aux bracelets des amazones avait eu raison de leur ennemi, qui capitulait sous les yeux figés de la jeune femme. Pour autant, malgré son teint, qui passait au violet, et les appels répétitifs de Dick, Donna n'avait pas desserré son étreinte autour de la nuque de l'intrus. Elle semblait ailleurs, absorbée. C'est finalement la main du Grayson qui la sortit de son état léthargique, la forçant à brusquement lâcher sa proie, qui s'effondra lourdement, sur le sol. Donna avait ainsi repris son souffle, offrant l'occasion à la douleur de ressurgir et de la tranquilliser. L'individu était Ko, immobile aux pieds de la Titan, qui le fixait, main sur sa blessure. Donna n'était pas sur de vouloirs savoir ce qu'il venait de se passer, esquivant prudemment le regard de Dick. Elle avait même repoussé sa main, s'éloignant de la victime, qui gisait sur le sol. « Tu peux le gérer ? ». Concrètement, elle savait déjà que la réponse était toute faite. Elle n'aurait d'ailleurs, même pas eu besoin de la poser.
De nouveau, elle avait la tête qui lui tournait, s'accordant quelques instants dans la cuisine, pour avaler de l'eau, et s'asseoir devant la fenêtre. Donna n'avait même pas pris la peine de vérifier si le second assaillant était dans les parages, sachant pertinemment qu'il serait déjà intervenu, si cela avait été le cas. Elle se sentait lourde, complètement perturbée, mais surtout, elle craignait de devoir affronter les reproches du Grayson, une fois qu'il aurait enfermé le ravisseur, et qu'ils pourraient de nouveau se sentir en sécurité. Donna avait quitté la pièce commune, ne se retournant pas sur son ami, qui devait sans doute avoir attaché l'agresseur, avant de l'emporter loin de l'appartement. Elle avait cru entendre la porte à un moment, se réfugiant alors dans son lit.
La Wonder Girl ne savait pas combien de temps elle avait dormi, mais la nuit était tombée. La lune brillait par-delà la vitre de sa chambre, la forçant à quitter son lit. Donna avait retiré son t-shirt, inspectant devant le miroir sa blessure, qui avait déjà bien évolué. Elle était déjà en phase de cicatrisation, accélérée par les capacités surhumaines de la brunette. Elle se sentait mieux, mais affamée. Ne sachant pas si Dick était là, elle avait malgré tout pris la peine de rejoindre la salle de bain, afin de se débarrasser des dernières traces de sang séchés sur sa peau.
Au bout de quinze minutes, elle était ressortie beaucoup plus fraîche et réveillé, avec un sweat géant sur le dos, en guise de pyjama. Donna s'était alors souvenu de l'état dans lequel elle avait laissée son lasso, se précipitant dans le dernier endroit où elle l'avait abandonnée. Mais il n'y était plus. C'était sur la table du salon qu'elle l'avait retrouvée, le ramassant pour le contempler, un long moment, avec tristesse et colère.

Un morceau de lasso entre chaque main, Donna était restée un moment dans un état de léthargie, à contempler les conséquences de son entêtement. Si elle avait pris la peine, le temps, d'attendre Dick, à ce foutu rendez-vous, entre démons, peut-être n'aurait-elle pas à gérer ce type de situation ? Submergée par les regrets, consumée par une sensation étrange, la Wonder Girl ne savait plus quoi faire. Avait-elle une chance de sauver son lasso, en se rendant au hall of justice, pour retrouver Diana ? A moins que la reconstruction de son arme ne soit possible que sur Themyscira ? La brunette n'avait jamais été confrontée à ce cas de figure, ne sachant donc pas si une solution existait, ou non. Quoi qu'il en soit, cela l'avait complètement ébranlé, bien plus que la blessure, qui continuait de cicatriser, sur son abdomen. Elle avait terminé sa course dans la cuisine, se contentant d'avaler une bouteille d'eau, à défaut de manger. Elle en aurait bien besoin, mais elle ne disposait ni de la motivation, ni de l'appétit pour.
Dick avait mis beaucoup de temps à rentrer, laissant Donna penser qu'il avait eu des problèmes. À plusieurs reprises, elle avait consulté son téléphone, au cas où, mais ce dernier n'aurait daigné donner aucune nouvelle. De toute façon, elle n'en avait pas réclamé non plus... Sur le divan, elle avait recouvert ses jambes du plaid, et abandonné son lasso brisé sur la petite table de salon, qui se trouvait juste en face d'elle. ELle n'avait pas pris garde à la pagaille dans la pièce, alors que des choses étaient renversées et des armes se trouvaient encore au sol. Au bout d'un moment, le détective avait fini par franchir la porte, saluant assez brièvement sa colocataire, avant de venir s'installer à ses côtés. Par précaution, Donna l'avait ausculté du regard, cherchant un quelconque indice, quelque chose qui lui confirmerait qu'il avait eu des soucis, ou au contraire, qu'il n'en avait pas eu. Dick avait l'air d'aller bien. À première vue. « Je suppose, que tu l'as laissé dans le Hall of Justice ?! ». Entamait-elle, sachant qu'elle aurait fait la même chose. « As-tu... croisé Diana ? ». Une question, dont elle connaissait, malheureusement, déjà la réponse. Ses iris s'étaient détournés de l'objet éteint, sur la petite table, contemplant dorénavant le visage du Nightwing. Pas une blague, une réplique cinglante pour le déstabiliser. Aucun sarcasme. Donna n'était vraisemblablement pas dans son assiette. « Vas-y dit le. ». Lui lançait la jeune femme, en cherchant à lui faire cracher le morceau. Il avait beaucoup pris sur lui aujourd'hui, entre la démonstration dans la salle de bain, les soins, l'intrusion, et la limite, presque franchi elle l'avait même laissé gérer tout le reste. Seul. « Je le mérite bien, après tout. ». Donna était en colère contre elle-même, Dick pourrait bien le constater, maintenant. Elle n'osait même pas le toucher, déphasé par les évènements. Elle ne savait même pas ce qu'il ressentait, s'il était en colère, lui aussi, ou tout bonnement déçu ?

Un sentiment désagréable était venu suspendre les sarcasmes de la Wonder girl, qui ne se sentait plus vraiment dans son assiette, ces derniers temps. L'incident de ce matin n'avait fait qu'aggraver son état et sa stabilité, plongeant la brunette dans une phase assez indescriptible. Non seulement, elle ne se reconnaissait plus, mais qui plus est, elle n'arrivait même plus à décrypter le comportement du Grayson, alors qu'il s'agissait de l'individu qu'elle connaissait le mieux sur cette planète. Elle avait peut-être besoin de se faire sermonner ? De l'entendre hurler ? Elle jugeait l'avoir mérité, pour son imprudence extrême, à deux reprises. Mais Dick ne le voyait pas de cette façon. Elle aurait pu le comprendre, la première fois, lorsqu'il l'avait découverte dans la salle de bain. Il avait fait un effort, parce qu'elle était sévèrement blessée. Mais cette fois ? Le détective semblait s'être éteint, comme lassé par la situation. Et concrètement, le découvrir aussi alangui, était beaucoup plus difficile à gérer que des cris ou des reproches. Il n'en avait pas la force ? Un peu vexée, Donna eut l'impression de passer au second plan. D'accord, elle lui avait demandé de s'occuper du prisonnier, ce qu'il avait fait, mais elle avait la sensation que le Nightwing avait changé son ordre des priorités. Apparemment, l'état dans lequel ils avaient laissé l'appartement, le tracassait beaucoup plus que le reste. À son tour, la jeune femme avait lâché un soupir, pinçant les lèvres avec désinvolture. Elle ne comprenait plus rien. Du tout. « C'est quoi le plus important ? ». Lâchait-elle, un peu sèchement, alors qu'il la dévisageait enfin. Au final, il s'intéressait à ses blessures, et elle n'avait pas su, encore une fois, comment le considérer. Étais-ce un effort forcé, ou bien essayait-elle inconsciemment de tout saboter, pour rien ? « Impecc' ! La blessure a complètement disparu, en un claquement de doigt, et j'ai même réussi à réparer mon lasso avec une petite formule trouvé dans le bouquin Harry Potter ! ». Donna avait fini par quitter le divan, pour le contourner, jugeant d'elle-même l'état de l'appartement. Elle était pieds nu sur des débris, mais concrètement, cela ne faisait aucune différence. « Tu penses que j'aurais pu le tuer ? Que j'aurais pu aller jusqu'au bout ? ». Dos à lui, elle avait fait mine de réunir des morceaux de l'étagère en miette, pour les séparer des bouquins et autres décorations qui s'y trouvait auparavant. Donna réalisait que finalement, son retour n'était pas aussi facile à gérer qu'elle le pensait. Elle avait la sensation d'agir à la place de quelqu'un d'autre, de s'approprier une identité qui n'était plus vraiment la sienne. Et ce ressentiment était encore plus flagrant lorsqu'elle avait utilisé son lasso sous le masque de Wonder Girl.

Harassée par la situation, et par les récents événements, Donna ne mesurait plus ses propos, et ses actes. Elle essayait encore une fois de secouer le Grayson, lui infligeant des sarcasmes et des remises en question complètement inutiles. Dans un premier temps, Dick était apparu las, esquivant prudemment son attaque, et en silence. Cela n'avait fait que faire douter davantage la Wonder Girl, qui, après avoir abandonné le divan, était revenue sur la scène du crime, pour ramasser quelques débris de meubles. Elle n'était plus très sûr d'avoir la force nécessaire pour faire le ménage, pourtant, la douleur de sa nouvelle cicatrice s'était considérablement atténuer, presque inexistante. Elle guérissait vite.
Le comportement du détective l'agaçait, parce qu'elle aurait mille fois préféré se faire hurler dessus, encaisser les coups, qui, peut-être, auraient pu la remettre à sa place, sur une meilleure trajectoire, pendant quelque temps. Mais encore une fois, Dick était apparu fatigué, lassé par ses paroles et ses contestations. Lorsqu'elle changea de ton, elle-même éreinté par son propre comportement, ce fut pour lui demander s'il pensait, qu'elle aurait pu être capable du pire. Cette fois, Dick avait fait un effort, argumentant assez nerveusement sur la question. Le Nightwing manquait habituellement de conversation, certes, mais avec Donna, il avait toujours été beaucoup plus ouvert et accessible. Pour autant, il était devenu brusquement très bavard, déstabilisant complètement la jeune femme. Elle n'osait plus se détourner de son étagère, écoutant avec stupéfaction son avis, très prononcé. Dick était officiellement agacé, elle pouvait aisément l'entendre, à l'intonation de sa voix. Au moins, cette fois, il ne se contenait plus... Il avait l'air de lui faire confiance, pensant qu'elle aurait pu, beaucoup plus gravement blessé la victime, mais qu'elle n'aurait pas pu le tuer. Pas volontairement, en tout cas. Donna espérait qu'il est raison, ne sachant plus du tout comment se positionner. Il allait même jusqu'à lui trouver des excuses, pour justifier ses actes, et cela, sans la juger. Était-il objectif au moins ? Ou se laissait-il berner par ses sentiments ? Ce qui bouleversa le plus la Troy, ce fut sa confidence ; lui aussi, il la trouvait différente. Changé, depuis son retour. Étais-ce positif ? Ou négatif ?
Mais alors qu'elle n'avait fait que penser égoïstement, à sa petite personne, Dick lui déclara qu'il aurait besoin de temps, lui aussi, pour se remettre de sa précédente disparition. Il était plutôt bon pour dissimuler ce qu'il ressentait, et en général, Donna l'était tout autant pour le cerner ; mais pas cette fois. Derrière son sourire, il souffrait, lui aussi. La jeune femme se sentait encore plus mal, assaillit par la culpabilité, et les remords.
Il aurait pu s'arrêter là, abréger cette conversation ainsi ; mais le Grayson avait vidé son sac jusqu'au bout. Lui révélant à quel point, il était encore traumatisé par sa mort. C'était lui qui l'avait ramassé, qui avait retrouvé son corps sans vie. Le cœur de Donna se brisa, alors qu'elle avait fini par levé ses iris vers lui. Il était en colère, à bout de souffle. Elle l'avait provoqué, dans le but de se faire sermonner, pas dans celui de le mettre dans cet état. Dick avait fini par fuir, pour se réfugier dans la chambre.
Figée par les émotions, elle avait brièvement essuyé une petite larme, retenant toutes les autres avec ténacité. Donna avait accordé quelques minutes aux balais, gagnant un peu de temps, de cette façon pour se ressaisir, elle, aussi, récupérant ce qui était récupérable, avant de jeter le reste dans un énorme sac. Au bout de presque, dix minutes, elle avait mis son immense fierté de côté, se dirigeant vers la chambre. Devait-elle toquer ? Ou lui imposer de nouveau sa présence ? Donna n'encaisserait pas un refus, alors, elle avait ouvert la porte, sans lui demander son avis, le retrouvant installé sur le lit. Prudemment, elle était venue s'asseoir à ses côtés, le dos contre la tête du lit, et les jambes dans la même position que les siennes. Au lieu de se ridiculiser, avec des mots, elle avait laissé sa première main prendre la sienne, pour la déposer sur sa propre joue, et ainsi l'emprisonner, puis avait réitérer avec la seconde. Ses mains sur les siennes. Une fois que son regard fut prisonnier du sien, elle avait libéré ses deux mains, pour venir caresser son visage. Donna s'était ensuite un peu mieux collé à lui, puis, doucement, elle avait effleuré ses lèvres, pour finalement venir l'embrasser. D'abord avec délicatesse, et peut-être avec un peu de prudence, dans le cas où il n'aurait pas envie de la voir... Puis, avec plus de fougue, et de passion. Ses bras avaient fini autour de sa nuque, pour se coller davantage à lui, et ainsi, elle avait laissé parler ses regrets, mais surtout ses sentiments.

Ses derniers mots avaient ricoché beaucoup trop fort, avaient engendré, non-intentionnellement, déjà trop de peine, alors Donna avait pris la décision de se taire. Elle s'était laissée guidée par son instinct, ses sentiments, mettant ainsi de côté ses émotions, aussi incohérentes et instables, soient-elles. Dick avait suffisamment souffert à cause des récents événements, et au lieu de le réconforter, de le rassurer, la Troy n'avait fait qu'aggraver les choses, augmentant sa détresse. Elle n'avait pensé qu'à elle, et malheureusement, elle l'avait réalisé trop tard.
Une fois dans la chambre, Donna était venue se coller à lui, lui montrant ainsi qu'elle était touché, et surtout, qu'elle allait enfin prendre, véritablement, en considération ses sentiments. Son décès l'avait marqué, bien plus profondément qu'elle ne l'aurait cru, et c'était la toute première fois qu'elle découvrait un Grayson aussi bouleversé. Pourtant, il avait déjà vécu beaucoup d'événements tragiques dans sa vie...
Ses lèvres contre les siennes, la Troy s'était d'abord montré prudente, douce, avant de se faire maîtriser par la passion. Dick s'était laissé faire, confortant la jeune femme dans ses intentions. Finalement, il l'avait entraîné sur ses genoux, et elle avait fini assise sur lui, sa cage thoracique tambourinant contre la sienne. À bout de souffle, Dick s'était détaché, sans pour autant se distancer d'elle. Leurs fronts collés, Donna était resté immobile, ses bras autour de son cou, son rythme cardiaque accordé au sien. « Tu veux que je reste ? » Osait-elle demander, dans un murmure. Parce qu'il venait de la fuir, de prendre de la distance, et que Donna s'était imposé, une énième fois, sans son autorisation. Peut-être préférait-il passer sa nuit seule ? Une part d'elle pourrait le comprendre. Mais l'autre ? « Je suis.. désolé. C'est juste que je ne sais plus trop où j'en suis. ». Confessait Donna, en plongeant ses iris dans les siennes. Elle faisait rarement des excuses, alors, il avait intérêt à les savourer. Donna éprouvait quelques difficultés à se re situer depuis son retour, ne sachant plus vraiment où était sa place, et surtout, qui elle était. « Mais je n'ai pas l'intention de me faire tuer une nouvelle fois, je t'assure. » Ajustait-elle, afin qu'il n'est pas à s'inquiéter davantage. Un peu tard pour ça, non ? « Je suis là. ». Et elle avait détaché ses bras de sa nuque, pour venir poser ses mains sur ses joues. Ses lèvres avaient effleuré les siennes, puis le bout de son nez. Elle l'avait embrassé, moins longtemps, puis avait récupérer la main de Dick pour la poser sur sa poitrine, précisément là où son cœur battait. « Et vivante. ». Donna avait ensuite, détournée sa main pour venir l'embrasser, elle aussi. Pas une seule trace d'ironie, ou de sarcasme, pas de pirouette verbale pour dissimuler son malaise ou son état, non. Elle faisait un réel effort, parce qu'elle l'aimait, tout simplement.

S'il y avait bien une chose, que Donna ne remettait pas en question, c'étaient ses sentiments pour Dick. Elle réalisait que, ces derniers temps surtout, elle n'avait pas été à la hauteur avec lui. Pourtant, le Grayson n'avait absolument rien exigé de sa part, mais Donna avait, elle-même, positionner la barre haute avec lui. Certainement du fait de leur relation de longue date, dorénavant évoluée, et du fait qu'ils se connaissaient beaucoup trop bien. Après tout, il pourrait plus rapidement se lasser d'elle, non ? À cœur ouvert, la Troy avait fait son possible pour s'exprimer sur ses récents troubles, et surtout, pour lui montrer qu'elle ne comptait pas le laissé tomber, malgré ça. Il avait l'air d'accepter la situation, même si, jusqu'à maintenant, il en avait beaucoup trop souffert. Ses bras étaient revenus étreindre son cou, toujours dans sa position initiale, tandis que ses iris étaient plongés dans les siennes. Il l'avait remercié, et sur le coup, Donna n'avait pas su quoi répondre, prise au dépourvue. Elle aurait aimé être capable de se livrer beaucoup plus vite à lui, mais ce n'était pas dans sa nature, et de toute évidence, dans la sienne non plus, elle ne le savait que trop bien. Il avait pourtant fait plus d'efforts qu'elle sur le sujet, jusqu'à maintenant. « Je sais. » Se contentait-elle de répondre, alors qu'il lui promettait d'être là pour elle, qu'importe les circonstances. Jusqu'à aujourd'hui, il avait tenu parole, en tout cas. « Et justement, j'ai besoin de toi. Je suis juste... plutôt nulle pour le dire...» Au moins, elle était parvenue à le sortir, cette fois-ci. Un petit sourire timide était apparu sur ses lèvres, le temps de quelques secondes. « OK, j'admets que, peut-être, mes méthodes ne sont pas bonnes, il faut juste que je trouve une meilleure façon de me gérer, et plus particulièrement avec toi. » En sous-entendant qu'elle n'avait pas été très agréable avec lui ? Tout à fait. « Au début, je pense que j'ai eu peur de tous ses changements, et bouleversements, depuis mon retour. Ça faisait beaucoup. Nous, inclus. Mais finalement, je crois que c'est bien la seule partie stable qui me permet de tenir jusqu'à maintenant. » Donna avait hésité un peu, mal à l'aise, mais elle se devait d'aller au bout des choses. Surtout maintenant. « Je veux juste... ne pas te perdre OK ? Ce qu'on a aujourd'hui, et beaucoup trop important pour moi. » Son front était revenue se positionner contre le sien, puis elle avait fini par l'étreindre complètement, enfonçant son visage dans sa nuque pour le serrer encore plus fort contre elle. En cet instant, elle se sentait vraiment vivante. Dick était son réconfort, son soutien, son meilleur ami, mais surtout, l'homme qu'elle aimait le plus.